Si le casque d'Apple a épaté tout le monde par ses caractéristiques techniques, son prix a également marqué les esprits : 3 499 $ ! 3 499 $, c'est sept fois le prix du futur Meta Quest 3. 3 499 $, c'est aussi le tarif de l'Hololens 2 de Microsoft, sorti en 2019 et toujours commercialisé au même montant… Au vu de ses promesses et du matériel, le prix de l'Apple Vision Pro est-il véritablement élevé ?
Une fiche technique impressionnante
Apple n'a pas manqué de superlatifs pour décrire son appareil, et il faut bien admettre que la prouesse technologique a de quoi impressionner même les plus sceptiques. Le casque, ou « ordinateur spatial » comme l'appelle la marque, est constitué d'une dalle de verre incurvée qui s'insère dans un cadre en alliage d'aluminium. Les deux écrans micro‑OLED affichent 23 millions de pixels, soit plus d'une TV 4K par œil. En comparaison, le Meta Quest 2 affiche « seulement » 7 millions de pixels.
Apple Vision Pro : le casque de réalité mixte d'Apple existe bel et bien !
Le casque d'Apple est bardé de pas moins de 12 caméras, 5 capteurs et 6 micros. Ceux-ci sont situés côté utilisateur pour permettre le suivi des yeux, mais aussi sur la face avant de l'appareil. Ici, les caméras servent à retranscrire l'environnement via un système de passthrough, mais également à proposer un suivi précis de la tête et des mains du porteur pour comprendre ses mouvements. Un capteur LiDAR et une caméra TrueDepth travaillent de concert pour cartographier la pièce en temps réel.
Plusieurs capteurs infrarouges permettent d'assurer un suivi des mains même dans des conditions de faible luminosité. Aidées par un anneau LED autour des lentilles, quatre caméras internes suivent les yeux de l'utilisateur. Celles-ci peuvent identifier le porteur grâce à Optic ID, un système d’authentification qui analyse l’iris sous différentes expositions. Les caméras permettent également de savoir où l'utilisateur regarde pour diminuer la charge GPU en détaillant moins les endroits hors de portée.
Les porteurs de lunettes devront acheter des inserts Zeiss en plus du Vision Pro
Apple a misé sur une puce M2 pour faire tourner l'appareil, qui est accompagnée d'une toute nouvelle puce R1. Celle-ci est dédiée au traitement des données provenant des caméras, des capteurs et des micros. La Pomme a dû inventer un système thermique spécial pour refroidir le matériel et offrir une expérience homogène sur la durée. Apple explique que la puce R1 permet de transmettre les images aux écrans en moins de 12 millisecondes, ce qui est indispensable pour une utilisation fluide et ne donnant pas la nausée.
Le son a également été fortement travaillé par Apple, qui vante deux « pods audio » offrant de l'audio spatial. La marque a aussi présenté un système de raytracing audio, analysant les propriétés acoustiques de la pièce pour adapter le son en conséquence.
3 499 $ pour tout cela, est-ce une bonne affaire ? C'est à vous d'en juger, mais on peut toujours prendre un peu de recul en comparant cette somme au reste du catalogue Apple. Pour ce prix, la boutique américaine permet de commander un MacBook Pro 16" avec 1 To de stockage et une puce M2 Ultra. On reste en dessous du prix d'un Mac Studio M2 Ultra, affiché à 3 999 $. Le placement de ce nouvel « ordinateur spatial » est donc celui d'une machine très professionnelle, les performances brutes étant « remplacées » par le design innovant et la multitude de capteurs nécessaires à l'expérience. Ce n'est pas donné, mais ce n'est pas non plus ahurissant.
Le Meta Quest Pro
On peut également comparer le casque et sa fiche technique à la concurrence. Le premier appareil qui vient en tête est forcément le Quest Pro de Meta, un casque misant lui aussi sur la réalité mixte avec des caméras permettant de voir son environnement. Le Quest Pro a reçu un accueil critique mitigé, et les ventes ont visiblement du mal à décoller : Meta a baissé d'un tiers le prix de l'appareil quelques mois après sa sortie. Initialement vendu 1 800 € (1 499 $), il est désormais à 1 199 €.
Sur le papier, le produit a des similitudes avec le Vision Pro : il embarque douze caméras avec cinq à l'avant, cinq à l'arrière et deux sur les côtés. Apple garde toutefois un gros avantage au niveau des composants et est largement au-dessus des 1 800 x 1 920 pixels de Meta, d'autant plus que le Vision Pro prendra en charge le HDR. Le Quest Pro n'a pas de capteur LiDAR ni d'écran externe pour les yeux, et compte moins de microphones. Les premiers testeurs du Vision Pro ont pu sans problème prendre des notes sur leur téléphone en le regardant depuis le casque, ce qui n'est pas envisageable sur l'appareil de Meta.
Côté puissance, Meta a choisi une puce Snapdragon XR2+ (Gen1) avec 12 Go de RAM. En face, Apple a annoncé une puce M2 qui peut monter jusqu'à 16 Go de RAM, ainsi qu'une nouvelle puce R1. Celle-ci est optimisée pour la gestion des innombrables capteurs, caméras et micros du casque, une puce sans équivalent chez Meta. Sur le papier, la puce M2 est déjà loin devant le SoC de Qualcomm, et le coup de pouce de la puce R1 pourrait creuser cette avance. Le fondateur de la startup française Lynx affirme que la latence du Meta Quest Pro est de 35 à 60 millisecondes, là où Apple promet 12 ms. La Pomme a donc un avantage évident.
Une autre différence importante est que le Vision Pro fonctionne par défaut sans contrôleur, rien qu'avec des gestes de la main et le suivi des yeux. Si Meta fournit des contrôleurs spécifiques avec ses casques, le fabricant donne aussi la possibilité de naviguer dans son interface juste avec ses mains, mais d'après les premiers essais la reconnaissance d'Apple est beaucoup plus précise et efficace.
Enfin, notons que le Quest Pro de Meta dispose d'une batterie intégrée, là où Apple impose un branchement externe qui peut passer par une petite batterie. C'est un compromis qui a des avantages et des inconvénients : c'est moins lourd sur la tête, mais il faut trimbaler un câble. Parmi les modèles haut de gamme, le Vision Pro est le seul à avoir une alimentation de ce type.
La concurrence
Meta n'est pas la seule entreprise sur le secteur de la réalité mixte haut de gamme : on peut également citer HTC, l'Hololens de Microsoft ou le finlandais Varjo. Le Vive XR Elite (1 399 €) n'offre que 1920 x 1920 pixels par œil et embarque une « simple » puce Snapdragon XR2 , la même que dans le vieillissant Meta Quest 2 sorti en 2020. La boîte fait un peu mieux avec son casque purement VR Focus 3 (1 500 €) qui affiche 2448 x 2448 pixels par œil, mais le matériel est ici aussi handicapé par son SoC XR2.
Certains projets intéressants pourraient arriver bientôt, comme le Pimax Crystal qui promet une définition supérieure à la plupart des casques (mais pas au Vision Pro) et un suivi des yeux. Cependant, il embarque également une puce XR2 standard accompagnée d'un deuxième SoC pensé pour la VR. Affiché à 1 599 $ en précommande, la puissance devrait être respectable, mais largement en deçà d'une puce M2. La question de la puissance peut être réglée en branchant ce casque ainsi que ceux de HTC à un PC pour disposer de performances autrement plus importantes, mais on perd alors l'aspect nomade.
De manière générale, les fabricants tiers risquent de subir le retard de Qualcomm, dont la prochaine puce pensée pour la VR (XR2 Gen 2) ne devrait pas rattraper Apple. On s'attend à la voir en action dans le futur Meta Quest 3, attendu à l'automne. Si l'on a peu d'informations sur ce SoC, UploadVR a tenté une approximation : le site estime que la puce M2 d'Apple devrait offrir une puissance CPU supérieure d'environ 25 %, une performance multicœur supérieure de 75 % et une puissance GPU plus élevée d'environ 15 %. S'il ne s'agit que d'une comparaison très approximative, cela semble confirmer l'idée qu'Apple sera à la pointe au niveau technologique quelque temps.
Le tarif de 3 499 $ place le Vision Pro au niveau des casques de réalité mixte professionnels, comme le fameux HoloLens de Microsoft. Si la dernière version sortie en 2019 est difficilement comparable avec le petit dernier d'Apple sur un plan technique, son placement tarifaire reste intéressant : l'appareil coûte 3 500 $ (3 849 €), soit le même prix que le Vision Pro. L'engin vise un marché très spécifique et montre qu'il y a une demande pour ce type de casque. Notons tout de même que l'avenir du produit est incertain, une troisième version se faisant attendre.
Le Varjo XR-3 (6 495 € !) vise les professionnels et propose une fiche technique intéressante avec 2 880 x 2 720 pixels par œil pour la zone périphérique, un LiDAR et de nombreuses caméras pour le passthrough. Sorti en 2021, l'appareil n'est pas autonome : il faut obligatoirement un ordinateur puissant pour le faire tourner. L'entreprise impose également un abonnement à sa plateforme, dont les tarifs commencent à partir de 1 495 € par an. À côté de cela, les 3 499 $ demandés par Apple semblent presque raisonnables…
Pour résumer, le Vision Pro d'Apple est sans conteste un produit onéreux quand on le compare à ce que propose la concurrence pour les particuliers, mais promet d'offrir un concentré de technologie jamais vu auparavant. Actuellement, aucun casque autonome ne propose une telle qualité d'image (supposée) et des performances d'un tel niveau. Le prix de 3 499 $ est élevé pour un produit dont on peine encore à percevoir les tenants et les aboutissants, mais ne l'est pas tant que ça si on s'attarde un peu sur les offres des autres spécialistes de la réalité mixte haut de gamme.
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