Selon toute vraisemblance, Apple devrait vendre cette année davantage de montres que l’ensemble des fabricants suisses. D’après une estimation de Strategy Analytics, Apple a vendu 22,5 millions de montres en 2018, quand les maisons suisses exportaient 23,7 millions de tocantes, selon la Fédération de l’industrie horlogère suisse. Les courbes devraient donc se croiser cette année, un évènement dont la portée sera surtout symbolique.
L’estampille « Swiss Made » évoque immanquablement l’image des manufactures mariant techniques de pointe et luxe suprême. Mais ni F.P. Journe et Philippe Dufour, ni même Patek et Bréguet, ne sont représentatifs de l’industrie horlogère suisse. La montre suisse moyenne sort de chaines partiellement automatisées, possède des composants mutualisés à l’échelle d’un groupe, et vaut 840 francs (env. 755 €). La comparaison avec l’Apple Watch n’est donc pas complètement absurde.
Et puis les fabricants de montres, qu’elles soient connectées ou pas, se battent pour la même position au poignet. Comme le remarque le New York Times, les fabricants suisses ont pris la mesure du danger représenté par Apple, et répondu frontalement avec leurs propres montres connectées. Tag Heuer et le groupe LVMH ont fait figure de pionniers, aujourd’hui suivi par Montblanc et le groupe Richemont (lire : Interview : la montre connectée, une évidence pour Tag Heuer).
Nicolas Baretzki, CEO de Montblanc, veut d’ailleurs tordre le cou à l’idée que les montres connectées ne pourront jamais concurrencer les montres mécaniques les plus luxueuses, parce que les unes seront obsolètes quand les autres pourront être passées aux générations futures. « Ce marché va devenir tellement important », dit-il, « il n’y aucune raison que les gens veuillent seulement porter des choses moches à leur poignet ».
Tag Heuer ne disait rien d’autre quand ses dirigeants déclaraient vouloir « amener du propos horloger dans l’univers de la montre connectée ». À long terme, l’essor des montres connectées pourrait même servir l’horlogerie traditionnelle. « Les montres connectées, et les vendeurs de montres connectées qui ne viennent pas du monde de la montre, amènent des clients à porter au poignet un appareil qui donne l’heure pour la première fois », conclut ainsi Reginald Brack, analyste au NPD Group.